RégionsA Laâyoune, l’élevage camelin à l’aube de sa transformation

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29 Juin

A Laâyoune, l’élevage camelin à l’aube de sa transformation

Par Mohammed BOUHJAR

Laâyoune – Devenir un acteur incontournable dans le marché de l’élevage camelin avec lequel il va falloir vraiment compter. Telle est l’ambition de Laâyoune-Sakia El Hamra, une région où le secteur camelin, qu’il soit laitier ou viandeux, est profondément lié au sol.

Au delà d’être l’un des icônes du patrimoine culturel sahraoui, le camelin contribue énormément au dynamisme socio-économique et met en valeur l’agriculture de la région.

Production du lait, de viande, de cuir et de laine: cette filière est emblématique d’une agriculture marocaine qui, grâce au Plan Maroc Vert (PMV), continue de gagner des espaces et dispose d’arguments pour conquérir encore des parts du marché mondial.

En effet, le secteur camelin dans la région de Laâyoune-Sakia El Hamra doit sa force au dromadaire adapté au climat saharien et aux ressources hydriques profondes pour les besoins d’abreuvement de l’effectif du cheptel important estimé à 105.000 têtes. Sans oublier les vastes terrains de parcours qui avoisinent les 9 millions ha, soit les 45% de la superficie totale de la région.

Il s’agit aussi « des possibilités de valorisation du lait et de diversification des productions (lait pasteurisé, lait fermenté appelé localement Lfrik, fromage frais, yaourts, poudre de lait), de la viande cameline, outre la ferme volonté politique de développer ce secteur », a expliqué à la MAP le directeur régional de l’Agriculture, Said Aqarial.

Reste que le secteur se heurtait depuis des décennies à des contraintes comme la difficulté de l’écoulement au marché local du lait pasteurisé ensaché, en raison de facteurs socio-culturels liés aux habitudes alimentaires de la population préférant la consommation du lait fermenté au lieu de celui pasteurisé et ensaché par l’unité de valorisation.

S’y ajoutent des problèmes de la collecte du lait vu la transhumance et les mouvements des troupeaux, outre « la mauvaise qualité du lait cru collecté de la région à cause de sa charge microbienne très importante, qui est due aux conditions de la traite », a fait remarquer M. Aqarial, citant l’absence d’étables et de matériel de traite, entre autres.

Pour lui, cette situation impose une durée de vie courte et limite la commercialisation dans le marché national du lait, en plus de la contrainte de l’éloignement du marché du Nord du Royaume.

Pour dépasser ces entraves et imprimer à ce secteur une dynamique d’évolution harmonieuse, équilibrée et évolutive, le ministère de tutelle a consacré une enveloppe budgétaire, dans le cadre du PMV, au développement de ce type d’élevage pour l’amélioration de la production à l’horizon 2020.

Concrètement, la direction régionale de l’Agriculture a programmé dans le cadre du Plan agricole régional sept projet Pilier II mobilisant un investissement global de 722,5 millions de dirhams (MDH), en plus de deux projets transverses concernant la régulation du phénomène de transhumance et l’amélioration des parcours d’un montant global de 318 MDH.

Parmi les autres chantiers clés figure la contribution par 8 MDH à la mise à niveau de l’abattoir de Laâyoune et à la création d’un marché du bétail dans la ville.

D’ores et déjà, ces chantiers ont commencé à porter leurs fruits en termes de hausse de la production et d’amélioration de sa qualité. Chiffres à l’appui: la production du lait de chamelle, qui représente le produit phase de la région, a augmenté de 207 % en dix ans pour atteindre 54.647 tonnes en 2018 contre 17.770 en 2008, avec un chiffre d’affaires estimé à 328 millions de dirhams.

Force est de dire que le lait de chamelle, assuré par un effectif important s’élevant à 50.705 têtes productrices, a fait depuis 2009 l’objet d’un programme de développement qui a permis la mise en place à la ville de Laâyoune d’une unité de valorisation d’une capacité de production de 8 T/jour, la création de 4 centres de collecte du lait et l’équipement de 85 ha irrigué en goutte à goutte.

La filière viande rouge cameline, l’activité traditionnelle des éleveurs de la région, n’est pas en reste de cette dynamique. Avec une production qui est passée de 912 tonnes en 2008 à 1.570 l’année dernière (+72%), cette filière a doublé son chiffre d’affaires pour se situer à 94 MDH, sans compter sa contribution à la création d’une importante quantité de journées de travail.

Prisée localement, la viande de dromadaire est quant à elle produite grâce aux apports fourragers offerts gratuitement par les vastes parcours de la région ayant l’objet d’amélioration suite aux projets transverses démarrés en 2015.

Au total, l’élevage camelin a engendré l’année dernière un chiffre d’affaires de 422 MDH, une valeur ajoutée de 234 MDH et un nombre total de postes d’emploi de près de 5.040 équivalents temps plein (ETP).

En clair, ces progrès qui s’inscrivent pleinement dans une stratégie de développement durable n’ont rien d’automatique. Au contraire, ils sont le résultat de politiques publiques bien conçues visant à faire de l’élevage camelin l’une des locomotives de l’économie d’une région qui, grâce au modèle de développement des provinces du Sud, ambitionne de se transformer en un pôle économique pionnier à l’échelle nationale et régionale, et une plaque tournante pour les échanges commerciaux entre l’Europe et l’Afrique subsaharienne.

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