A l’ONU, une réflexion collective pour donner un coup de fouet aux objectifs de développement durable Texte
Karim AOUIFIA
Nations Unies (New York) – La date limite fixée à 2030 pour réaliser les objectifs de développement durable (ODD) s’approche à grands pas. A mi-parcours, les 17 cibles définies par les Nations Unies comme les “ingrédients” d’un monde plus durable et plus inclusif peinent à se frayer un chemin sûr vers la concrétisation.
De la lutte contre la pauvreté, la faim et le changement climatique en passant par la promotion de l’éducation, la prospérité économique, l’égalité des genres, la transition énergétique et la cause de la paix, la marche vers la consécration des « fondements » de la durabilité trébuche et butte sur une ère de crises et d’incertitudes.
“Les crises multiples, aux effets conjugués, ont fait payer un lourd tribut à tous les pays, en particulier aux pays en développement, et ont sapé les progrès accomplis sur la voie des objectifs de développement durable”, constate le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres dans son dernier rapport sur l’état d’avancement des ODD.
Le chef de l’ONU pointe du doigt une ère caractérisée par des risques de plus en plus nombreux et par une incertitude exacerbée par des “chocs et des crises” devenues plus fréquents, plus intenses et plus étendus, affectant davantage de personnes sur une zone géographique plus vaste.
“Les chocs économiques, financiers, sociaux et sanitaires se propagent rapidement au sein des pays et d’un pays à l’autre et se transforment en crises; les conflits sont la réalité quotidienne de millions de personnes dans le monde; et les phénomènes météorologiques extrêmes sont de plus en plus fréquents”, regrette-t-il.
Ce constat sans ambages a été confirmé par le rapport 2024 de l’ONU sur les objectifs de développement durable qui juge “insuffisants et alarmants” les progrès mondiaux réalisés pour atteindre ces cibles.
Pour les auteurs de l’étude présentée récemment à New York, près de la moitié des 17 objectifs affichent des progrès minimes ou modérés, tandis que plus d’un tiers sont au point mort ou font marche arrière, depuis qu’ils ont été adoptés par les États membres de l’ONU en 2015 pour apporter la paix et la prospérité aux populations et à la planète.
Le rapport fait ressortir également que 23 millions de personnes supplémentaires ont été poussées dans l’extrême pauvreté et que plus de 100 millions de plus souffraient de la faim en 2022 par rapport à 2019, tandis que le nombre de morts civiles dans les conflits armés a grimpé en flèche l’année dernière.
Ce bilan annuel des ODD montre, selon les observateurs, que la communauté internationale “est en train d’échouer” dans la poursuite d’un monde plus sûr, plus résilient et avant tout débarrassé des pesanteurs du passé et des tensions géopolitiques.
“Nous n’avons pas une minute à perdre”, pour inverser la tendance et honorer la promesse “de mettre fin à la pauvreté, de protéger la planète et de ne laisser personne de côté”, a lancé le haut responsable onusien.
Le rapport identifie les effets persistants de la pandémie de COVID-19, l’escalade des conflits, les tensions géopolitiques, le manque de financement et l’aggravation du chaos climatique comme des obstacles majeurs aux progrès.
C’est dans ce contexte que s’est tenu du 8 au 17 juillet à New York le Forum politique de haut niveau de l’ONU sur le développement durable (HLPF) pour galvaniser les efforts mondiaux en vue de redonner de la vigueur au multilatéralisme en proposant des solutions innovantes nécessaires à la relance du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
“À maintes reprises, l’humanité a démontré que, lorsque nous travaillons ensemble et de manière collective, nous pouvons trouver des solutions à des problèmes apparemment insolubles”, a déclaré à cette occasion le secrétaire général adjoint de l’ONU aux affaires économiques et sociales, Li Junhua.
Contribuant à cette réflexion collective pour sauver les ODD, Antonio Guterres recommande d’intégrer ces cibles dans tous les mécanismes pertinents de prise de décision, de financement et d’application du principe de responsabilité, d’établir des partenariats et une coordination efficaces avec les principales parties prenantes et de favoriser un engagement fort et une appropriation des objectifs par les jeunes.
Parmi ces objectifs, le chef de l’ONU estime que les pays du monde doivent accorder un degré de priorité élevé à l’éradication de la pauvreté et à l’élimination de la faim d’ici la date butoir de 2030, expliquant que lorsqu’ils échappent à la pauvreté et à la faim, les individus peuvent contribuer à une économie florissante et en bénéficier, créant ainsi un cycle de prospérité qui favorise la résilience nationale face à l’impact de chocs et de crises inattendus.
Pour l’ONU, le prochain Sommet du futur prévu en septembre prochain à New York sera une étape cruciale pour réorienter les efforts vers la réalisation des objectifs. Il s’agit de répondre en premier lieu à la crise de la dette qui touche de nombreux pays en développement et de mobiliser les efforts en faveur d’une refonte urgente de l’architecture financière internationale pour amorcer une véritable relance du Programme de développement durable avant 2030.