La crise de la Covid-19 menace le financement des ODD (OCDE)
Paris – Les pays en développement sont confrontés à un déficit de financement de 1.700 milliards USD par rapport à ce dont ils auraient eu besoin cette année pour être en bonne voie pour atteindre les ODD d’ici 2030, car les pouvoirs publics aussi bien que les investisseurs sont aux prises avec les retombées économiques de la crise du Covid‑19, selon la dernière édition des Perspectives mondiales du financement du développement durable, de l’OCDE publiée mardi.
D’après le rapport, les pays en développement devraient enregistrer une chute de 700 milliards USD de leur financements privés extérieurs en 2020 et un déficit de financement de 1.000 milliards USD pour des dépenses publiques consacrées aux mesures de relance consécutives à la pandémie de coronavirus par rapport à ce qu’ont dépensé les économies avancées, où les pouvoirs publics disposent d’une plus grande capacité d’emprunt.
La baisse des financements privés s’explique par la chute des investissements de portefeuille et des investissements directs étrangers et par un recul des envois de fonds depuis l’étranger par les travailleurs émigrés, souligne le rapport.
« Le financement du développement durable menace de s’effondrer au moment où il est plus indispensable que jamais. Covid-19 efface des années de progrès en matière de développement et entraîne des revers majeurs pour toutes les sources de financement des pays en développement en difficulté, dont beaucoup sont entrés dans la crise avec des obstacles structurels déjà graves», explique le Secrétaire général de l’OCDE, M. Angel Gurría, à l’occasion de la présentation du rapport lors de la Réunion à haut niveau du Comité d’aide au développement de l’OCDE.
« Alors que le Covid‑19 efface déjà certaines avancées enregistrées en matière de développement et qu’il nous reste encore de nombreux défis à relever, il est urgent de repenser la finance mondiale de sorte qu’elle encourage les investissements durables et que nous intensifions nos efforts pour aider les pays en développement à sortir de la crise d’une manière inclusive, résiliente et durable», a préconisé Angel Gurría.
Au déficit de 1.700 milliards USD anticipé pour 2020 s’ajoute un déficit annuel existant de 2.500 milliards USD, correspondant aux financements qui font défaut aux pays en développement pour pouvoir atteindre les 17 ODD d’ici à 2030. Parallèlement, 90 des 122 pays en développement connaissent aujourd’hui une récession économique, puisque le virus touche de plein fouet des secteurs comme le tourisme, la production manufacturière et les produits de base. La pandémie risque également de peser sur les montants d’aide au développement que fournissent les économies avancées aux économies en développement, souligne le rapport.
À 379.000 milliards USD, la valeur des actifs financiers dans le monde n’a jamais été aussi élevée depuis la crise financière mondiale, mais 80 % de ces actifs sont détenus dans les économies avancées, et en l’absence de critère de mesure universel on ne sait pas grand-chose de leur impact sur le développement durable, explique le rapport.
Seulement 20 % de ces actifs sont détenus dans des pays en développement, où vivent plus de quatre habitants sur cinq sur la planète. La réorientation de seulement 1.1 % du total des actifs détenus par les banques, les investisseurs institutionnels ou les gestionnaires d’actifs (soit 4 200 milliards USD) suffirait à combler le déficit de financement des ODD, estime le rapport.
Remédier aux inefficiences des systèmes financiers et fiscaux, qui font perdre des sommes considérables aux pays en développement, par la fraude et l’évasion fiscales et des frais de transfert élevés appliqués aux envois de fonds depuis l’étranger (qui s’élevaient en moyenne à 7 % sur 2017‑19), contribuerait à améliorer la répartition géographique des actifs.
Le rapport recommande d’améliorer les incitations pour orienter les financements, à renforcer la transparence et la redevabilité associées aux flux financiers et à élaborer une solution systémique à la dette des pays en développement pour éviter les problèmes de liquidité, garantir l’accès aux marchés des capitaux et préserver la stabilité bancaire.
S’appuyant sur les conclusions des Perspectives mondiales, l’OCDE travaille avec les Nations Unies à la conception d’un cadre visant un meilleur alignement des financements mondiaux sur les ODD, affirme l’Organisation de Coopération et de développement économiques dans son communiqué.