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29 Jan

Économiser l’eau, un devoir national

Par Adil Zaari Jabiri

Rabat – La pénurie d’eau n’est pas un sujet éristique pour meubler des discussions ou animer des débats de télévision sur l’avenir de la planète. C’est une réalité cruelle dont la gravité s’accentue de jour en jour par la récurrence des épisodes de sécheresse, le réchauffement de la planète, mais aussi et surtout par le comportement humain.

Les prévisions les plus optimistes estiment que les deux tiers de la population mondiale pourraient vivre dans des conditions extrêmes de stress hydrique dès 2025.

La situation est plus alarmante dans le continent africain où l’impact des changements climatiques prend souvent une tournure dramatique (catastrophes naturelles, famine, exode…).

Au Maroc, depuis 1980, les effets des changements climatiques se manifestent par une tendance à l’aridité, une réduction des apports d’eau, une augmentation des températures et des phénomènes extrêmes (inondations, vagues de chaleurs…), mais la problématique de l’eau échappe de justesse à un scénario catastrophique, grâce à une politique visionnaire de gestion de l’eau initiée très tôt (barrages, recyclage des eaux usées). Cependant, ces efforts doivent composer aujourd’hui avec un déficit notable en termes de précipitations et une très forte pression sur les ressources hydriques.

Les experts évaluent les ressources en eau dans notre pays à moins de 650 m3 par habitant par an, sachant qu’on devrait dépasser les 1.000 m3 pour éviter la pénurie hydrique.

Depuis 2022, la desserte en eau potable des agglomérations urbaines, qui ne représentent que 10% des réserves hydriques, n’est plus garantie comme auparavant, sans parler des besoins agricoles en eau des périmètres irrigués, qui ne pourront pas être satisfaits, menant à un recours accru à l’exploitation intensive des eaux souterraines, déjà en état de surexploitation avec des bilans largement déficitaires.

Pour Fouad Amraoui, professeur chercheur en hydrologie à la faculté des sciences Ain Chock de Casablanca, la situation hydrique actuelle est « inédite et très préoccupante, car nos réserves en eau sont au plus bas dans la majorité de nos barrages ».

En cette fin du mois de janvier, alerte-t-il, « nos barrages ne sont remplis en moyenne qu’à hauteur de 23%, avec des disparités très fortes entre régions », notant que les barrages de l’Oriental, du Centre et du Sud affichent des taux de remplissage très bas, à l’image de ceux d’Al Massira qui est presque à sec ou encore Bin El Ouidane qui est à environ 5%.

En dépit de cette situation de stress hydrique désormais chronique, les ressources en eau, notamment les nappes phréatiques, continuent d’être surexploitées et le citoyen, indifférent, ne veut toujours pas abandonner certains reflexes qui menacent la sécurité hydrique du pays.

A ce sujet, le professeur Amraoui est catégorique : « notre relation avec l’eau devra changer. Les mots clés devront être : la gestion raisonnée, la consommation responsable, l’économie, la rationalisation ».

Face à l’effort de l’État, sous l’impulsion de SM le Roi Mohammed VI qui veille à un suivi personnel permanent de cette question stratégique à l’effet de relever le défi de la sécurité hydrique et d’assurer l’approvisionnement en eau potable à l’échelle de toutes les régions et localités du Royaume, les usagers, eux, devront assumer leur part de responsabilité en changeant leurs habitudes de consommation et en adoptant des comportements éco-citoyens.

Une campagne à travers les médias sensibilise déjà à l’économie de l’eau. Dans cet élan de prise de conscience rigoureuse et responsable, les mosquées du Royaume sont également mises à contribution en rappelant aux fidèles, notamment lors des prêches du vendredi, la nécessité d’éviter le gaspillage et l’usage abusif de l’eau. Des instructions fermes sont données à l’échelle régionale, en fonction des spécificités, afin de rationaliser l’eau, de détecter et réparer les fuites dans les réseaux, d’interdire l’arrosage des espaces verts à l’eau potable, de fermer quelques jours par semaine les hammams et les unités de lavage des voitures, d’interdire le remplissage des piscines etc. L’effort des pouvoirs publics est là. palpable et mesurable.

Si le Maroc a réussi jusque-là à bien gérer la situation à travers une panoplie de mesures visant la mobilisation d’une très grande partie de son eau conventionnelle superficielle et souterraine afin de la rendre disponible en tout temps, le citoyen, lui, continue à se complaire dans l’inaction, en feignant d’ignorer que l’eau au bout du robinet n’est qu’un confort éphémère.

Encore une fois l’appel du professeur Amraoui est sans équivoque : « la population se doit d’adhérer à l’effort national d’économie d’eau ».

« Chaque personne à son échelle, par esprit civique, doit réduire sa consommation en eau dans ses pratiques quotidiennes (douche, cuisine, fuites, jardin…), le but étant de tenir le plus longtemps possible, en espérant que les mois prochains puissent nous apporter des pluies bénéfiques ».

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