Forêts du Maroc: une gestion durable pour les générations futures
Par: Manal KOUBIA
Rabat – “Les forêts précèdent les peuples, les déserts les suivent ». Cette citation de l’écrivain François René de Chateaubriand révèle l’importance de la forêt pour la vie de l’Homme qui y trouve une source d’oxygénation et de détente et un havre de paix où les âmes assoiffées de méditation et de quiétude se réfugient.
Les forêts abritent 80% de toutes les espèces d’amphibiens connues et contiennent plus de la moitié du stock mondial de carbone retenu dans les sols et la végétation, indique l’Onu sur son site web, alertant que plus de 30% des nouvelles maladies depuis 1960 sont attribuées au changement d’utilisation des terres, y compris la déforestation.
Ce n’est pas donc fortuit que la préservation des forêts soit l’un des Objectifs de développement durable (ODD) adoptés par les Nations Unies. Il s’agit de l’ODD 15 : “Préserver et restaurer les écosystèmes terrestres, en veillant à les exploiter de façon durable, gérer durablement les forêts, lutter contre la désertification, enrayer et inverser le processus de dégradation des sols et mettre fin à l’appauvrissement de la biodiversité”.
Inscrit dans cette dynamique de développement durable, le Maroc peut s’enorgueillir de sa stratégie forestière « Forêts du Maroc 2020-2030 », lancée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI en février 2020.
Cette stratégie, qui place la population usagère au cœur de la gestion des forêts, vient apporter les réponses appropriées et nécessaires pour réconcilier le citoyen marocain avec son espace forestier, selon l’Agence nationale des eaux et forêts (ANEF).
L’objectif fixé est aussi de rendre le secteur plus compétitif et moderne à travers la valorisation des ressources forestières et la mise en place d’un nouveau modèle de gestion inclusif, durable et créateur de richesse.
Depuis son lancement il y a quatre ans, plusieurs chantiers ont été ouverts pour mettre en œuvre les axes majeurs de cette stratégie. Il s’agit notamment de réinventer et structurer l’approche participative, de différencier et développer les espaces forestiers selon leur vocation, d’investir dans la modernisation des différentes professions forestières et de procéder à une refonte institutionnelle et légale.
Créée pour incarner un nouveau modèle de gouvernance du secteur des eaux et forêts qui prône « une gestion proactive » et une « approche participative », l’ANEF continue d’avancer dans la réalisation des différents chantiers définis dans la feuille de route spécifique, se concentrant sur « des programmes d’action précis », liés aux défis de transformation du secteur et alignés sur les principaux axes de la stratégie.
Ainsi, dans le cadre de la stratégie “Forêts du Maroc 2020-2030”, l’Agence indique avoir développé une composante dédiée à la filière bois-énergie afin d’améliorer sa gestion et trouver « un équilibre optimal » entre les diverses sources d’approvisionnement et les différents usages, tout en prenant en compte les impératifs de durabilité des écosystèmes forestiers.
La stratégie vise, dans ce sens, à accroître l’approvisionnement en bois-énergie grâce à des programmes de reboisement qui seront mis en œuvre avec une augmentation progressive des superficies plantées jusqu’à atteindre 100.000 hectares à l’horizon 2030.
Des innovations techniques sont déployées pour garantir le succès des programmes de reboisement, notamment l’utilisation de techniques de plantation économes en eau et le recours à des technologies telles que les drones pour le suivi et la prévention des incendies.
En sus, l’introduction de la tourbe dans les pépinières vise à améliorer la qualité des plants et ainsi accroître le taux de réussite des reboisements.
La stratégie “Forêts du Maroc 2020-2030” a aussi pour but d’encourager l’adoption de solutions alternatives au bois-énergie en favorisant l’utilisation de technologies améliorées et de sources d’énergie alternatives et ambitionne de vulgariser l’utilisation de fours améliorés à haute efficacité énergétique.
A cet égard, l’ANEF “distribue annuellement et en moyenne 10.000 fours multi-usages et économes en bois au profit des usagers des forêts vivantes dans les zones retenues comme prioritaires”, a-t-on fait savoir auprès de l’agence.
En ce qui concerne l’utilisation du bois comme matière première industrielle, la stratégie “Forêts du Maroc 2020-2030” envisage de développer une “dynamique productive” à travers un partenariat public-privé via des concessions forestières. Ce partenariat concerne 100.000 hectares (ha) d’eucalyptus pour développer la filière industrielle biomasse énergie et 20.000 ha de pins sur la côte Atlantique pour produire à terme 140.000 m3 de bois en vue d’en réduire les importations.
Décryptant le volet financement durable de la mise en œuvre de la stratégie, l’ANEF explique qu’il s’agit, d’une part, d’un financement interne disponible à travers les recettes propres, et d’autre part, d’un financement à mobiliser auprès de l’Etat et des bailleurs de fonds internationaux.
Dans ce sens, l’ANEF affirme avoir réussi à mobiliser jusqu’à présent un total de 455 millions d’euros sur la période 2021-2028, couvrant ainsi 80% des financements supplémentaires nécessaires d’ici à 2030.
Dans le cadre de la coopération internationale, le secteur des Eaux et Forêts bénéficie actuellement de l’appui de plus d’une dizaine de partenaires techniques et financiers, dont l’Union européenne, l’Agence française de développement, la Banque européenne d’Investissement, la Banque mondiale, l’Agence allemande de coopération internationale, la Banque allemande de développement, le Fonds français pour l’environnement mondial, les Affaires mondiales Canada et l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture.
L’ANEF est actuellement en phase finale de formulation de programmes de coopération avec la Banque africaine de Développement et le Service forestier coréen.
S’agissant de la solidarité africaine, l’ANEF rappelle que le Maroc, sous la vision éclairée de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, érige la coopération en gestion forestière avec les pays d’Afrique comme une priorité stratégique.
Et d’ajouter que le Royaume qui, à travers l’ANEF, assure, depuis 2019, la présidence du Groupe africain des négociateurs dans le cadre de la Convention des Nations Unies pour la lutte contre la désertification, « plaide fortement pour la prise en compte des priorités régionales et pour le renforcement de la mise en œuvre des programmes de lutte contre la désertification dans le continent africain ».
Dans le cadre de cette coopération, le Maroc contribue au « renforcement des capacités » d’un ensemble de cadres techniques issus d’une dizaine de pays africains dans plusieurs domaines couvrant divers aspects de la gestion des ressources forestières.
L’ANEF, en partenariat avec la Banque africaine de développement, est également en phase finale de formulation d’un programme d’appui pour un développement inclusif et durable des zones forestières.
Ce programme englobe une composante dédiée au renforcement de la coopération Sud-Sud tournée vers l’Afrique construite autour de trois principales modalités de coopération : « l’organisation de sessions de renforcement de capacités, la promotion de l’échange technique et la conception conjointe de projets pilotes en liaison avec la gestion durable des forêts”.
Ce sont autant d’efforts révélateurs de l’importance qu’accorde le Maroc à la gestion durable de ses forêts pour répondre aux besoins présents et surtout ceux des générations futures.