ActualitésL’Archipel de Mogador, un milieu insulaire à forte valeur historique et écologique

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04 Déc

L’Archipel de Mogador, un milieu insulaire à forte valeur historique et écologique

Par Samir LOTFY

Essaouira, 04/12/2020 (MAP)- Dressé en plein coeur de la Baie d’Essaouira, en véritable « témoin » de longs siècles de succession de civilisations, et d’histoire si riche et passionnante, l’Archipel de Mogador se veut, sans nul conteste, un milieu insulaire, si unique en son genre sur le littoral atlantique du Royaume, avec une importance écolo-biologique inégalable, compte tenu des énormes potentialités naturelles qu’il recèle.

Etalé sur une superficie de 26,7 ha, l’Archipel de Mogador est distant d’un kilomètre de l’extrémité de la jetée ouest du port de la ville d’Essaouira et de 1.200 m de l’embouchure de Oued Ksob.

Ce site féerique comprend 8 ilots de tailles inégales à savoir : « L’Dzira Lakbira » (grande île/ île principale), « Firaoun » (Pharaon), « Smiâa d’Firaoun », « Maqtoâ », « Smiâa d’Dlimi », « Hajrat Haha », « Hajrat Rbia », et « Hatf Ghorrabo ».

L’Archipel de Mogador se présente, ainsi, comme un espace emblématique de par les qualités écolo-biologiques qu’il procure, la richesse de ses écosystèmes et de ses milieux ainsi que ses caractéristiques historiques « impressionnantes », à même d’enrichir fortement l’identité de la ville d’Essaouira. D’énormes d’atouts qui lui procurent une place de choix parmi les sites remarquables du sud-ouest marocain.

Proclamé « patrimoine culturel » par l’UNESCO depuis 2001, l’Archipel présente cette singularité d’illustrer, brillamment, cette jonction entre moult caractéristiques historiques, géologiques et géomorphologiques impressionnantes, couplées à sa richesse faunistique et floristique.

L’ensemble de ce potentiel fait que cet archipel côtier de la Cité des Alizés (avec les dunes côtières littorales) est classé comme zone humide « RAMSAR ». C’est aussi un « Site d’Intérêt Biologique et Ecologique : SIBE », retenu en 1996 dans le cadre du Plan Directeur des Aires Protégées du Maroc, compte tenu de ses richesses floristiques, faunistiques marines et terrestres.

Selon la Direction Régionale des Eaux et Forêts du Haut Atlas, l’Archipel de Mogador « est protégé par l’ensemble de ces statuts nationaux et internationaux de protection (SIBE, Site RAMSAR, patrimoine culturel de l’UNESCO, réserve de chasse permanente) », notant qu’il possède un fort potentiel éco-touristique, et constitue un laboratoire à ciel ouvert contribuant à la préservation et à la conservation du capital animal et végétal insulaire de la région.

Consciente de l’importance de la préservation de ce Site, ladite Direction entreprend, dans le cadre de la réalisation de ses objectifs, des projets ambitieux pour la conservation des espèces et des habitats, la valorisation des atouts culturels et éco-touristiques du site, en passant par la mise en place des aménagements paysagers et des signalétiques, et ce dans le cadre des programmes de sensibilisation et de programmes ambitieux d’éducation à l’environnement pour la préservation de ce site, dont sa richesse fait son unicité.

Et la Direction de préciser que l’Archipel de Mogador est « couvert de formations ligneuses basses composées formant un « tapis » gras et cristallin en présence de chénopodiacée et de caryophyllacée, constituant un réceptacle d’oiseaux d’une très grande importance notamment, les faucons d’Eléonore, une espèce protégée au niveau international et qui ne compte plus que six mille couples à l’échelle mondiale, la colonie nicheuse de l’archipel est la plus grande au monde ».

Dans une déclaration à la MAP, M. Lemdarsaoui El Mehdi, ingénieur d’Etat, Chef du Centre de Conservation et de Développement des Ressources forestières d’Essaouira, a fait savoir que l’Archipel de Mogador offre un couvert végétal riche et varié composé d’espèces présentant des valeurs patrimoniales, et des espèces endémiques strictement marocaines, outre des endémiques des Canaries, et de la Mauritanie entre autres.

Quant à la faune terrestre, l’Archipel de Mogador a un grand intérêt ornithologique et est caractérisé par la nidification régulière de neuf espèces d’oiseaux (2 marines, 3 espèces de rapaces et 4 espèces terrestres), 3 reptiles et la présence d’un unique mammifère à savoir le lapin, a-t-il poursuivi.

« Parmi cette importante avifaune nidificatrice, on cite l’espèce la plus emblématique à savoir le Faucon d’Eléonore, espèce hautement protégée à l’échelle mondiale et considérée comme typiquement méditerranéenne », a relevé M. Lemdarsaoui, notant que cette espèce s’installe à l’Archipel pour se reproduire entre avril et octobre avant d’entamer sa migration vers le Madagascar.

« Il faut savoir que ce visiteur d’été tardif commence sa nichée à partir du mois de juillet avec l’arrivée des petits oiseaux migrateurs (passereaux) qui constituent sa source de nourriture », a-t-il expliqué, rappelant que le Faucon d’Eléonore niche en deux autres zones atlantiques, en l’occurrence les falaises de Salé et dans les îles des Canaries.

« Actuellement on recense près de 1.700 couples qui nichent chaque année sur cet Archipel et cette colonie nicheuse de l’Archipel est la plus grande au monde (6000 couples à l’échelle mondiale) », a précisé M. Lemdarsaoui.

L’Archipel compte également d’autres espèces, telle que le Goéland Leucophée, avec environ 4.000 couples recensés, la plus grande colonie marocaine et la colonie méridionale la plus importante connue de l’espèce. Une population particulièrement dense en limite périphérique de l’aire de distribution de cet oiseau méditerranéen dont l’existence, à Essaouira, est étroitement liée aux activités de pêche du port, a-t-il précisé.

On note aussi l’existence du Grand Cormoran, le Faucon pèlerin, le Faucon crécerelle, alors que d’autres espèces peuplent les falaises, à l’instar du Grand corbeau, du Martinet pâle, du Pigeon biset et de la Fauvette mélanocéphale.

M. Lemdarsaoui n’a pas manqué de préciser que « face à la richesse écologique et à l’intérêt grandissant pour la conservation de la biodiversité et des ressources naturelles de l’Archipel de Mogador, ce Site a été classé réserve de chasse (1962), réserve biologique permanente (1980), SIBE en 1996, patrimoine de l’UNESCO (2001) et Site RAMSAR en 2005 ».

Afin de préserver cette richesse faunistique, les oiseaux de l’île sont sujets de recensement dans le cadre des travaux de recherche scientifique impliquant plusieurs intervenants (acteurs institutionnels, scientifiques et société civile …), surtout en ce qui concerne le faucon d’Eléonore.

Actuellement, le département des Eaux et Forêts envisage de renforcer la dynamique de gestion conservatoire déjà mise en place sur l’Archipel, en accordant à ce Site un statut de protection légal, en application de la nouvelle loi sur les aires protégées, ce qui permettra d’augmenter et de pérenniser son statut de protection en le classant aire protégée, a-t-il conclu.

In fine, l’Archipel de Mogador qui fait la fierté d’Essaouira, cité antique du Maroc atlantique, est l’un des sites alliant à la fois richesse écologique et une portée historique et civilisationnelle inégalable, de quoi fournir une très belle image de l’authenticité d’un Maroc si fier de sa diversité, de la singularité de sa civilisation millénaire et de son identité.

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